//Flash Back//

//Fin du Flash Back//

Des humains en quantité industrielle. Adelicia. Noctis. Enfin, Azghar. Cette ville me faisait voir des personnes aussi diverses que variées que je n'appréciais pas en grande majorité. Pour une raison qui me dépasse toutefois, chaque jour ou presque, je retournais dans cette ville, ne serait-ce que pour y voir le bon déroulement. Sentir l'odeur nauséabond que les pots d'échappement laissaient échapper négligemment ; entendre ces humains beugler ou vociférer quelques insultes à l'adresse de leurs congénères qui n'étaient sans doute pas assez "actifs" ou "réactifs" à leur goût. Une cacophonie qui n'en était que décuplée par les sens aiguisés que je possédais. Pour une fois en ce funeste jour, je portais du noir, chose qui faisait ressortir ma peau déjà trop pâle, sans parler de mes cheveux, laissés une fois encore détachés, libre d'aller et venir au gré du vent. La robe laissait mon dos nu et ne se fermait que dans le bas de mon dos, sa seule attache se trouvait au niveau de ma nuque, là où deux pans de tissus s'entrelaçaient élégamment pour ne former qu'un simple et banal nœud caché par ma chevelure. Sans manche, mes épaules demeuraient découvertes et mes bras étaient, quant à eux, enveloppés dans de haut gants en tissus fin. Une tenue qu'on aurait pu dire de soirée ; une tenue qui n'était pourtant que pure banalité à mes yeux. Et puis, de telles tenues étaient de mise lorsqu'on savait où je me rendais.

Morgana. Cela faisait bien longtemps que je ne l'avais pas vu, et notre dernière rencontre avait été des plus froides si ma mémoire est bonne. J'avais ouïe dire qu'elle avait investi largement dans un bar qui serait, sans doute, une grande réussite. Déjà connu alors qu'il était ouvert depuis peu, j'étais curieuse de le visiter, par ailleurs, il m'évitait de fâcheuses rencontres avec les Loups. Voir cette si belle tenue en lambeaux me mettrait hors de moi sans nul doute. Les hauts talons de mes escarpins claquaient sèchement sur le béton alors que j'apercevais déjà l'enseigne voyante du bar "Blood Suck". Un tel nom m'arracha un maigre sourire et parfois, je me demandais si elle ne souhaitait pas réellement montrer sa nature aux yeux de tous. Un bref soupir et ma main gantée s'abattait lentement sur la porte du bar après avoir passé deux colosses aux visages peu amicaux. Si j'avais un jugement à porter sur ce bar, j'aurais dit qu'il était pour le moins coloré, bien que vide pour le moment. Vide, ou presque. Il n'était pas compliqué de voir chaque détails de la salle, cette dernière était loin d'être noire de monde et, chose tragique, au-delà de la musique, j'entendais jusqu'au bruit du torchon nettoyant minutieusement un verre.

Un bref soupir s'échappa de mes lèvres alors que j'avançais silencieusement. Morgana n'était pas là ; certes, son parfum régnait dans la pièce, mais la douce fragrance était bien trop faible pour laisser penser que la patronne était dans son établissement. Un nouveau bruit attira mon attention sur une demoiselle derrière le bar : elle avait, semble-t-il, échappé tragiquement le verre qu'elle nettoyait plus tôt. Pareille maladresse m'arracha un sourire et je ne pus que déplorer le fait qu'elle soit humaine. Un Vampire aurait eu le temps de rattraper au moins trois fois ce verre avant qu'il ne tombe. Bien vite, l'humaine disparut derrière le bar pour tenter de réparer, sans doute, les dégâts qu'elle avait causé. De mon côté, je rejoignais une table en silence, m'installant sur des fauteuils agréables et observant l'intérieur de la bâtisse. Après mure réflexion, c'était peut-être un peu trop coloré pour moi ; à moins que je n'ai les yeux trop sensibles. Néanmoins, j'étais forcée de constater que le décor était chic, riche et moderne ; autant dire : à l'image de Morgana.

Mon coude droit était posé sur la table luisante, replié, il permettait à ma main d'accueillir mon menton alors que j'observais distraitement ; petit à petit cependant, mes paupières se refermaient sur les pupilles améthystes qu'elles cachaient bien souvent. L'humaine se décida alors à s'approcher de moi, lentement. Pourtant son approche ne passa pas inaperçue, aussi discrète puisse-t-elle être. Une odeur venait me caresser les narines, une fragrance délicate et affreusement attirante. Qui était-elle donc ? Plus elle approchait, plus cette odeur qui semblait lui coller inexorablement à la peau s'intensifiait. Loin d'être du parfum, c'était plus naturel encore. Le sang souillé qui bouillonnait dans ses veines, peut-être ? La belle rejoignit enfin la table que j'occupais ; elle avait une peau pâle, bien qu'un peu moins que la mienne, peut-être, des cheveux d'une couleur peu commune et un regard assez envoûtant. Sa voix mielleuse me parvint alors sans que je ne puisse dévier mes pupilles de sa silhouette. Apparente fragilité. Un sourire étira sensiblement mes lèvres alors que j'essayais de retirer les longs gants recouvrant ma main.

" Votre poignet serait idéal, mais je doute que ce soit chose possible, alors... Mettez-moi ce qui vous fait plaisir, tant que c'est mangeable... "

Un claquement sec retentit alors dans la pièce, signe que le gant de droite avait enfin lâché prise et délivré mon avant-bras à la lumière artificielle des néons. Un nouveau soupir s'échappa de mes lèvres alors que je retirais le second gant tout aussi lascivement que le premier. Mon regard, pourtant, était porté sur l'humaine à mes côtés et un bref sourire s'afficha sur mon visage.

" A qui ai-je l'honneur, d'ailleurs ? "

Un maigre sourire avait étiré les lèvres de la belle alors qu'elle était à proximité... Rien de sincère sans doute, le travail seulement la forçait à être agréable. Après la commande formulée, elle avait tourné les talons en vitesse afin de rejoindre le bar. Là-bas, elle avait préparé un verre de sang avant de le poser sur un plateau pour me l'amener finalement. Un détail attira mon attention lorsque le plateau fut à portée : elle avait posé une petite coupelle remplie de ces gâteaux apéritifs que les humains appréciaient tout particulièrement. Pourtant elle devait savoir que ce genre de nourriture ne me faisait strictement rien. Je pouvais m'en délecter - si on peut se délecter d'une telle nourriture -, jamais elle ne serait en mesure de me nourrir d'une quelconque façon que ce soit. Nouveau sourire, puis elle faillit partir, cependant, ma question la stoppa et la fit rougir en prime. Réaction qui m'amusa quelque peu. Son nom était donc Maria Angeles. La demoiselle ne me disait rien, mais je tâcherai d'en demander un peu plus à Morgana la prochaine fois que je la verrais. Fatalement, la question me fut retournée, et c'est avec un léger sourire que je lui répondais en un murmure.

" Amélia. "

Élégamment, l'humaine glissa l'une de ses mains dans sa chevelue atypique, pendant que mon regard s'égarait sur ces biscuits posés sur la table. La voix de l'humaine me perturba toutefois dans mon observation, ce fut pour la bonne cause, dirons-nous. Ainsi donc, elle savait pour moi, donc, sans doute pour Morgana également ; ce qui expliquait sa présence en ces lieux. Par ailleurs, elle prétendait ne pas haïr les Vampires, c'était même tout le contraire. Étais-je censée comprendre par ces propos qu'elle appartenait plus ou moins à ce mouvement que les humains avaient créé en réaction à la Coalition ? Ces "Pro-vampires" ? La réponse ne tarda pas : un faible silence s'étendit dans la pièce, bien vite brisé par la suite de ses paroles. Soit dit en passant, l'humaine n'avait pas froid aux yeux pour oser me demander un service. Quand bien même je ne serais pas dirigeante de toute cette petite populace, je ne vois pas de quel droit une humaine, être inférieur, pourrait se permettre de demander un service à une Vampire. Le service en question était pourtant envisageable. Ainsi donc, elle voulait faire partie de ces "Pro-vampires" qui s'opposent plus ou moins directement à la Coalition. Pourquoi ?

Ma main se posa alors sur le verre à pied avant de le porter à mes lèvres. L'odeur du liquide contenu s'approchait en effet du sang, le goût également, pourtant rien n'était comparable avec le plaisir de mordre une gorge à pleine dents. Peu importe au fond, je n'étais pas venue ici pour boire et me délecter de ce sang en bouteille, aussi bon soit-il. Tout en m'emparant d'un de ces biscuits apéritifs, je ne pus empêcher mes lèvres de s'étirer en un rictus de satisfaction. Le bretzel parvint finalement à mes lèvres et mes crocs le divisèrent en deux. Le biscuit en question n'était pas désagréable, et même si ce geste était totalement dénué d'intérêt, il m'occupait l'esprit tant bien que mal. Mes yeux se reportèrent sur l'humaine alors que le restant du bretzel rejoignait son autre moitié. Passant faiblement ma langue sur mes lèvres, ma main invita l'humaine à s'assoir face à moi. Une sorte de tête-à-tête improvisée, même si je n'avais pas prévu de parler affaires ce soir. A la base, je voulais simplement voir Morgana, mais, faute de mieux...

" "Aider" est un bien grand mot... Cela dit, vous vous adressez à la bonne personne, ma chère. J'ai quelques questions à vous poser, toutefois... "

Les Pro-vampires étaient des personnes relativement spéciales, il fallait bien l'avouer. Si certains étaient sains d'esprit - en très petit nombre -, d'autres étaient un ramassis d'être douteux, suspects et j'en passe. Des "hérétiques", de simples fous. Certains nous prenaient pour des Dieux et nous vouaient presque des cultes, d'autres n'étaient que des psychopathes assoiffés de sang qui nous respectaient pour les carnages que certains d'entre nous pouvaient bien commettre. Il n'y avait qu'un petit nombre d'humains qui étaient conscients de ce qu'ils devaient vraiment faire. Leur but était presque utopique : nous faire aimer des humains, et si possible, démanteler la Coalition. De nouveau pions à ajouter à ce plateau d'échec déjà bien garni. D'une légère pichenette, j'envoyais la coupelle de gâteaux en direction de l'humaine : elle en avait une meilleure utilité que moi.

" Pourquoi aimer les Vampires ? Qu'est-ce qui vous pousse à penser que nous méritons d'avoir une place parmi vous ? Et enfin... Savez-vous que devenir Pro-vampires avec un sang tel que le votre est pure suicide ? "

Un charmant sourire prit place sur mes lèvres à la fin de ma phrase : autant être directe.

Bien que rougissante, l'humaine s'installa face à moi, timidement. Et c'est de la même façon qu'elle s'empara d'un gâteau. Pourtant, à chaque fois que son regard croisait le mien, la demoiselle ne pouvait s'empêcher de baisser les yeux ou alors de changer de sujet d'observation, soudainement. Un comportement qui m'amusait, quelque part. Pourtant, elle n'hésita pas à me faire une longue réponse, pire que cela, l'enchaînement des mots sembla lui donner des ailes et, dans son récit, elle en oublia sa gêne, joignant à ses paroles des gestes et des expressions. A la fin de son discours, la demoiselle se rendit compte de son changement de posture et même de ce qu'elle venait de faire. Rougissante à nouveau, elle se rassit plus raisonnablement avant de reprendre la parole plus modérément. Le principal était dit, de toute façon. Bien que toujours aussi réservée, elle semblait un peu plus confiante et cela se ressentait dans ses propos. Après avoir parlé une seconde fois, elle s'autorisa même un rire, même si celui-ci était plus nerveux qu'autre chose. Son regard s'attarda un peu sur moi mais il revint se heurter à la table alors qu'un faible sourire étirait ses lèvres. Une dernière fois alors, ses mots résonnèrent dans la pièce.

Sa franchise était agréable et bien qu'intimidée, elle ne se laissait pas marcher sur les pieds. Voilà deux qualités que j'affectionnais tout particulièrement et ce petit bout d'humaine marquait bon nombre de points de par sa simple attitude. Par ailleurs, si j'analysais les propos qu'elle venait de tenir, je n'avais pas grand reproche à lui faire. Contrairement à certains, elle ne nous vouait pas une adoration sans faille, ce qui lui permettait au moins de réfléchir. Celle-là, au moins, je ferais en sorte qu'elle ne finisse pas en casse-croûte pour les membres de mon clan. Fille de Mordu et d'humaine, elle semblait avoir perdu les deux à l'heure actuelle. Orpheline, donc. Elle savait beaucoup de choses, aussi. J'ignore si les gènes vampiriques pouvaient expliquer la couleur de ses cheveux - encore que beaucoup parmi nous ont des cheveux d'une couleur atypique comme le blanc ou l'argenté -, mais ils expliquaient sans nul doute celle de ses yeux et l'odeur de son sang. Elle m'a ensuite expliqué que, pour elle, les Vampires n'ont jamais été fous ni sanguinaires, ce qui eut le mérite de m'étonner. En voilà une pensée hors du commun... Plus elle parlait, et plus elle devenait intéressante sans même s'en rendre compte.

Étonnante, vraiment. Lorsqu'elle m'avoua trouver les Vampires "humains", mon sang ne fit qu'un tour et mes ongles s'enfoncèrent sensiblement dans la table. Certes, nous avions un côté humain, tout comme les Loups, cela dit, il était inutile de le dire d'une façon aussi abrupte. Nous n'étions pas non plus humains, sinon il serait inutile de nous nommer "Vampires". Mais soit, je pouvais comprendre ce qu'elle venait de me dire. Elle était passionnante. De par sa façon de penser mais aussi de s'exprimer. Je ne pensais pas cela parce qu'elle était de notre côté, du côté des Vampires, mais plutôt parce qu'elle croyait les mots qu'elle déblatérait. Elle pensait réellement que nous avions un côté humain, elle savait mieux que quiconque, semble-t-il, qui nous étions. A ses mots, mon sourire s'était effacé. Pourtant aucun sentiment négatif ne m'atteignait, j'étais simplement... Impressionnée. Par une vulgaire humaine. Rares étaient les êtres capables d'avoir une sorte d'admiration de ma part, ils se comptaient sur les doigts d'une main, et encore. Michael en avait fait partie : aujourd'hui il était Vampire comme moi. Malgré sa façon de penser, il y avait encore un brin d'innocence dans ses propos et sa vision du monde. Pourquoi ne pas vivre tous ensemble ? Parce qu'il y a et y aura toujours des rivalités entre nous. Parce que, comme chez les humains, parmi les Vampires et les Loups, il y a des fous sanguinaires incapables de contrôler leurs pulsions.

Ce qui l'avait amené à nous défendre, c'était les Vampires croisés par le passé, et son père. Elle avait encore raison sur un autre point : par rapport à moi, elle avait nombre de désavantages, mais parmi eux, il y avait un avantage conséquent. Jour, nuit, qu'importe : elle pouvait évoluer comme elle le voulait. Mon sourire revint à l'une de ses phrases. En effet, ce n'est pas parce qu'elle nous défend qu'elle est obligée de tous nous apprécier. Je devrais voir les humains de la même façon : ce n'est pas parce que certains sont faibles et inutiles qu'ils le sont tous. Ils n'ont pas que des défauts, et cette fille en était la preuve vivante. La seconde partie de ses propos semblait être plus centrée sur elle. Non elle ne me paraissait pas "folle", et je l'aurais presque préféré. Au contraire, elle était tout ce qu'il y a de plus sensé et du haut de ses quelques années, elle avait réalisé des choses que d'autres, bien plus vieux, n'avaient pas encore compris. A nouveau mon sourire s'étira lorsqu'elle avoua être surprise de ne pas avoir été mordue. Sans nul doute, son sang était attirant, il avait quelque chose en plus, offert par les gènes vampiriques. Mais elle n'était pas non plus tombée sur n'importe quel Vampire, et peut-être devrais-je lui avouer prochainement. Mes yeux se perdirent un moment sur son minois. Elle me rappelait un peu Michael. L'un et l'autre avaient su attirer mon attention en dépit de leur pseudo-infériorité. Si Michael, c'était principalement par sa beauté, elle, c'était par ses pensées.

" Je ne vais pas m'amuser à détailler tous vos propos... Vous m'avez convaincu, Maria. Bienvenue chez les Pros-vampires. "

Un bref sourire étira mes lèvres alors que je l'observais. Évidemment, elle serait en mesure de nous aider. En tout cas, elle en avait le potentiel. Par ailleurs, je l'appréciais bien.

" A mes yeux, vous n'êtes pas folle, vous semblez même être tout le contraire, d'ailleurs. Pour ce qui est de votre sang, je tâcherai de trouver un moyen d'atténuer son effet ou au moins son odeur... J'hésite encore, cela dit. Je pense que, maintenant, il vous faut savoir quelques petites choses à notre sujet. Morgana McBeth, votre patronne, est une brillante espionne pour les Vampires ; si elle vous a engagé, alors je peux vous faire confiance. Nous sommes amies depuis un moment et elle m'est d'une aide précieuse, entre autre, parce qu'elle dirige un trafic de sang dans la ville. Ce trafic nous permet de tuer un peu moins d'humains... Vous l'avez dis vous-même : vous n'êtes pas obligée d'apprécier tous les membres du clan mais il faut savoir que parmi nous, certains sont bels et bien fous et sanguinaires, moi la première, peut-être bien. Parmi nous, il y a également des traitres, comme Noctis Arcium, par exemple. Il est, bien évidemment, recommandé de ne pas s'approcher de tels individus. Et enfin, si je ne vous ai pas encore sauté à la gorge, c'est parce qu'en plus de dix-neuf siècles d'existence, on acquiert une certaine maîtrise de soi ; un nouveau sourire étira mes lèvres alors que je l'observais tout en jouant avec le verre encore plein ; Cela dit, ce n'est pas l'envie qui manque. Enfin, un dernier détail qui peut, peut-être, vous servir : je suis celle qui a fondé le clan des Vampires. Celle que Sullivan Herns veut tuer par dessus tout... "

Un tel constat ne put que me faire rire légèrement. Réaction naturelle ou peut-être nerveuse, je n'en sais rien. Mon regard vint alors se perdre dans le liquide rougeâtre stagnant dans le verre entre mes mains, tandis que mon sourire reprenait place sur mes lèvres.

" Malgré tout ça... Vous êtes toujours avec nous ? "

(Pas trouvé de thème musical ... =S)

(C'est dommage parce que j'aime les musiques que tu mets xD Mais pas grave ma chérie ^w^)

C'était étrange, elle qui voulait tant nous rejoindre, lorsqu'elle avait eu la confirmation de sa toute nouvelle appartenance aux pros-vampires, elle avait semblé surprise un temps. Malgré cela elle s'en était remise bien vite et se mettait finalement à sourire en me remerciant avant que je n'enchaine sur bon nombre d'informations. La réflexion qu'elle fit lorsque j'abordai le sujet des traitres me fit sourire, elle semblait les détester un peu plus que moi encore. Bien évidemment, comme bien d'autres, mon âge l'avait surpris mais ce ne fut rien comparé à l'expression qu'elle arbora lorsqu'elle eut connaissance de mon identité. Un certain temps lui fut, semble-t-il, nécessaire pour se remettre de ses émotions et elle bégaya un peu afin de me confirmer sa présence à nos côtés. Elle n'avait vraiment pas froid aux yeux, pour une petite humaine. Pourtant, malgré ce qu'elle venait de dire, son visage était devenu soudainement blême et sa pâleur rivalisait de loin avec la mienne. Difficilement, la demoiselle se releva et tenta vainement de faire un pas avant de s'écraser à nouveau sur son siège. Cette attitude étrange me laissa perplexe un bon moment. Elle-même semblait être un peu chamboulée, pourtant elle reprit ses esprits et se mit à parler. Maria s'excusa alors, mais bien vite son côté " plein de vie " reprit le dessus et elle s'aventura à me demander quand elle pouvait commencer. Ce revirement soudain d'attitude me fit rire un peu. La voir déterminée et perplexe à la fois était plutôt jouissif et la dite demoiselle m'amusait grandement.

" Je ne vous demande pas de tout enregistrer aujourd'hui, poser des questions ne vous sera pas interdit, c'est plutôt bien interprété d'ailleurs. Vous pouvez commencer dès maintenant, Maria... Tâchez d'être discrète simplement, et si vous pouviez m'obtenir quelques informations sur la Coalition, je vous en serais fort redevable... "

Faute d'avoir ton sang...

Un léger sourire avait étiré mes lèvres alors que je me redressais, me levant ainsi plus facilement et gracieusement que ce qu'elle avait pu faire peu avant. Ma main droite s'empara des longues mitaines retirées plus tôt, et elle entreprit d'enfiler celle de gauche à la main adaptée. Un mouvement lent et délicat était nécessaire pour ces accessoires fragiles et délicats bien que splendides en mon sens. Le second gant demeurait dans ma main droite soigneusement plié alors que mon regard se baladait sur la pièce. Quelques clients semblaient arriver à en juger par les pas qui se rapprochaient du bar, encore à l'extérieur. Les vigiles à la porte bougeaient un peu comme pour dissuader n'importe quel insolent se pensant assez malin pour leur échapper. Un volte-face rapide me permit de me retrouver à nouveau face à elle, tout sourire. Ma main dévoilée se tendit alors devant elle, là, afin de l'aider à se redresser plus aisément sans chuter à nouveau sur son siège. Elle se devait de reprendre rapidement ses esprits car déjà, une bande de quatre ou cinq personnes entraient dans le bar. En dépit du brouhaha qu'ils amenèrent, leur présence était pour le moins agréable, elle me permettait de prendre congé sans avoir à me préoccuper de l'état de la petite Maria. Une fois redressée, ma main gantée s'attarda sur son visage et mon pouce et mon index se saisirent de son menton alors que je détaillais une dernière fois les traits de son visage. Peut-être était-ce sa partie vampirique qui lui donnait cette aura, cela dit, même simplement humaine, elle aurait été agréable à regarder. Un sourire satisfait étira encore mes lèvres et mon visage s'approcha du sien jusqu'à ce que mes lèvres se collent aux siennes.

... Je me contenterai de tes lèvres.

Le baiser ne dura pas, pourtant. Mes lèvres se posèrent brièvement sur les siennes, un simple frôlement que déjà, je me tenais à bonne distance d'elle. Ma main droite se saisit alors du verre de sang avant de le vider en plusieurs gorgées. Je n'affectionnais pas tout particulièrement ce sang en bouteille mais j'avais une sainte horreur du gâchis alors il avait fallu faire un effort conséquent pour que mon estomac accepte ce liquide pourtant si agréable d'ordinaire. Cette fois-ci, je me décidai à enfiler l'autre gant, masquant alors ma main droite jusqu'à présent dévoilée. J'étais à nouveau prête pour partir et il me fallait encore réfléchir à un moyen de lui éviter un quelconque accident avec les miens par la faute de son sang. Il me fallait la ménager d'une mauvaise rencontre, j'avais besoin d'elle plus que d'autres. Un bref mouvement de tête me permit d'écarter ces pensées de mon crâne et un nouveau sourire lui fut offert.

" Embrassez votre Patronne pour moi, je vous prie, Maria... En attendant, passez une excellente soirée et prenez soin de vous. "

Ma silhouette se détourna alors d'elle et rejoignit la sortie sans prêter attention aux autres personnes présentes dans le bar. Un nouveau groupe s'apprêtait à entrer alors que je sortais, d'autres vampires encore. Il me fallait maintenant me changer les idées : la proximité avec l'humaine avait éveillé ma faim et ce n'est pas le sang bu au bar qui avait bien pu mettre fin à mon appétit. Je n'était pas des plus gourmandes, cela dit, j'aimais bien mordre un ou deux humains par nuit simplement pour le plaisir de transpercer leur chair de mes crocs. Je ne les tuais pas, ou alors rarement. La plupart du temps, ce n'était qu'un amusement, après tout ; et je n'ai aucun intérêt à briser mes jouets, sans compter que certains y prennent goût et se décident à nous rejoindre. La ville s'était un peu calmée : les voitures étaient moins nombreuses et elles avaient été remplacées par les piétons dans les parcs et divers boutiques du centre-ville. Nombre de gens se retrouvaient pour aller boire un verre ou dîner au restaurant. Des repas en famille, des repas d'affaires ou des repas pour retrouver simplement des connaissances qu'on ne voit que trop rarement. Et dire qu'il me faudrait choisir une proie dans ce beau petit monde. D'ordinaire, mon choix se portait plutôt sur les hommes âgés de 18 à 25 ans... Pourtant c'était son sang que j'aurais voulu boire ce soir.

A cette idée, mes pas se stoppèrent et ma silhouette pivota sur elle-même. Mon regard améthyste se posa alors sur l'enseigne encore visible du Blood Suck et un soupir rageur s'extirpa de mes lèvres. Non, ce soir, la victime ne s'en sortirait certainement pas : elle paierait pour cette frustration grandissante.